« Les Cranach de Reims » sont les photographies d’hier des personnalités de l’Allemagne protestante au même titre que les crayons des Clouet le sont pour les personnalités de la France du XVIe siècle. Ils ont été acquis en 1752 par la Ville de Reims grâce au legs d’Antoine Ferrand de Monthelon, directeur de l’école de dessin – l’une des premières créées en France – et forment une collection qui doit sa renommée à ces portraits dessinés, rares dans l’oeuvre de Cranach – treize au total. Dessinés sur le vif, avec une technique rapide associant la pierre noire pour la vivacité du trait et l’estompe des modelés à la détrempe qui permet des indications de couleurs, ils fascinent toujours. Facilement transportables, ils servent de modèles qui peuvent être habillés, coiffés en fonction de la mode et des besoins, et reproduits sous toutes les formes (peinture, vitrail, médaille, miniature, tapisserie). En 2015, à la suite de la rétrospective consacrée à Lucas Cranach le Jeune à Wittenberg, cette série exceptionnelle a été attribuée à l’oeuvre révélé de Cranach le Jeune, fils de Cranach l’Ancien.
Ici, il s’agit probablement d’un prince allemand du temps de la Réforme.
L’hypothèse formulée du portrait de Christian II, roi du Danemark, chassé de son pays et ayant séjourné à Wittenberg en 1523 (peut-être dans la maison de Cranach), est désormais totalement réfutée. La ressemblance n’est pas convaincante et la date des œuvres prématurée pour le style de ce dessin. Comme pour les autres portraits de Cranach le Jeune de cette série, par unité d’écriture, visible notamment dans la liberté maîtrisée du trait et par unité esthétique, il peut être daté autour des années 1540. Seul le chapeau, accessoire de base pour un portrait, est traité d’une façon différente. Celui-ci n’est plus cerné dans sa surface, il est uniformément rempli. Cette technique semble être postérieure à la création originale.
Dernièrement, une nouvelle identification a été envisagée. Cette proposition renvoie au portrait du duc Frédéric de Saxe qui fut un temps également reconnu dans le portrait aujourd’hui identifié comme étant Jean-Ernest de Saxe-Cobourg. Mais en dehors de la coiffe qui les rassemble - un élégant béret, incliné à la mode espagnole - les portraits de comparaison ne semblent pas convaincants. Datée comme les autres, vers 1540, cette étude d’un homme d’une grande sérénité et de force tranquille est éloignée du visage bouffi et expressif appartenant aux images connues de ce prince héritier handicapé mental. Aujourd’hui, seul le titre de prince est conservé pour cet inconnu. Son collier énigmatique le suggère. Sans doute est-t-il membre ou allié de la maison de Saxe, dont de nombreux représentants sont identifiés dans la série. [M-H Montout-Richard, 2016]
Notice complèteTête de de trois-quarts droit, coiffée d’un large béret.
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