Dès ses débuts, Lhermitte réalise de nombreux fusains illustrant toujours le thème de la vie paysanne. Le filage était l’une des principales occupations de la femme, soit au champ, soit à la veillée. Ici, témoin de cette vie quotidienne, il nous montre une pièce de la maison, éclairée par une large fenêtre, uniquement meublée par un immense rouet double, actionné par l’une des deux femmes, alors que l’autre file un écheveau. Une grande quenouille se trouve dans l’angle de la pièce, au fond à gauche. L’artiste dans son « Catalogue des ouvrages » date la scène de 1891 et la situe à Laren en Hollande, petit village où les peintres de l’école de La Haye se retrouvent. Sans doute se souvient-il aussi du tableau de Max Liebermann, « Les Fileuses à Laren », présenté au salon de Paris de 1887.
André Theuriet, dans son ouvrage sur « La Vie rustique », parle ainsi du mode de filage : « Dans le système plus compliqué du rouet, la pédale agitée par le pied fait tourner la roue et met en mouvement la bobine qui remplace avantageusement le fuseau. […] La fileuse tire de sa quenouille une pincée de filasse, l’effile, l’allonge, la tord et l’assujettit à la bobine qui tourne avec un sourd ronronnement et à laquelle le mécanisme de la pédale et de la roue ne laissent plus un moment de repos. » De même, il rappelle cette chanson : « Mets à ta quenouille un ruban rose, et file gaiement la toile dont tu feras une jupe fraîche pour aller au bal avec ton amoureux. Mets à ta quenouille un ruban blanc, et file joyeusement la toile blanche dont tu feras les draps de ton lit de noce. Mets à ta quenouille un ruban bleu, et file doucement la toile fine avec laquelle tu façonneras les langes de ton nouveau-né… À ta quenouille, un ruban noir ! File sans trop laisser voir, le linceul dont quand tu mourras, l’un de nous t’enveloppera… » Cela montre l’importance accordée à cette tâche avant le remplacement par les machines industrielles qui vont entraîner une modification des activités de la femme à l’intérieur de la ferme.
Depuis son entrée dans les collections en 1897, ce fusain, restauré, est présenté pour la première fois au public. Ce dessin est issu du legs Ernest Irroy, propriétaire d’une maison de champagne et collectionneur rémois. [C. Delot, 2016]
Notice complèteJeunes femmes en pied, respectivement de trois-quarts dos et de profil gauche, chaussées de sabots, vêtues de robes, portant un tablier, dans une vaste pièce rustique, affairées auprès d’une machine à filer.
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