Ce dessin fait partie d’un important ensemble de portraits dessinés, légués en 1752 à l’Ecole de Dessin de Reims, par son premier directeur et professeur, Antoine Ferrand de Monthelon. Si cette collection fut enrichie de dessins d’élèves souvent exécutés d’après des œuvres plus anciennes datant des XVIe et XVIIe siècles, l’inventaire qui fut établi entre 1768 et 1770 ne comptait pas moins de 3289 dessins originaux, parmi lesquels se trouvaient 380 portraits ou « Testes au Crayon noir estompé et en rouge et teste en pastel » (Inv. ms. Lelarge, pp. 9-10 ; Massé, 1978, n°123, p.74).
Le modèle porte une coiffure en vogue à la cour de France sous le règne d’Henri IV, plus précisément entre 1595 et 1610. Dans ce portrait inachevé, on ne perçoit que la très légère esquisse d’une encolure en V et de ce qui pourrait correspondre aux extrémités d’une large collerette relevée à l’arrière de la tête. Ce type de collerette découvrant le cou est visible sur plusieurs portraits féminins dessinés de l’époque d’Henri III (1574-1589), conservés au musée du Louvre (INV33583, 33587 et 33591) ou à la Bibliothèque nationale ("La Marquise de Treinel" par François Quesnel, 1585, BNF, Est., Na 22 rés. f°24). Ces observations tendent à dater le portrait des années 1580-1590, ce qui ne coïncide pas avec l’identification proposée par Charles Loriquet en 1881 dans son "Catalogue historique et descriptif du Musée de Reims". Il y reconnaît Jacqueline de Bueil, comtesse de Moret (1588-1651), dont le portraitiste de cour Daniel Dumonstier (1574-1646) réalisa trois portraits (BNF, Est., Na 24a rés. f°38, 39, 40). Cependant, outre l’incompatibilité des dates, les dissemblances entre la physionomie décrite par le dessin de Reims et les portraits de Jacqueline de Bueil compromettent cette identification.
Des opérations de conservation effectuées en 2009 suggèrent que la feuille, de couleur brun roux clair, a probablement été teintée intégralement dans un bain. Cette préparation du papier pourrait s’expliquer par l’emploi de la technique du pastel pour colorer la chevelure blonde du modèle. En effet, contrairement aux craies de couleur, le pastel s’accroche difficilement au support. Il nécessite donc une préparation du papier puis une fixation du dessin achevé. Il a toutefois l’avantage de s’estomper plus facilement que les craies de couleur et cela n’a pas échappé aux portraitistes de la famille Dumonstier qui ont mis à l’honneur cette technique. En 1978, Marie-Catherine Massé, reprenant l’attribution proposée par Charles Loriquet en 1881, classe ce dessin sous le nom de Daniel Dumonstier. Toutefois, les dimensions de la feuille s’éloignent des habitudes du portraitiste et on observe une mise en place surprenante de certains effets. Les rehauts de craie blanche, très rares dans l’œuvre de Daniel Dumonstier, s’écrasent sans nuance sur les reliefs au lieu de prendre délicatement la lumière. Peut-être faut-il voir dans ces anomalies une reprise maladroite effectuée ultérieurement. [L. Causse, 2021]
Notice complèteVisage féminin de trois-quarts gauche, cheveux relevés en arrière, buste esquissé
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