Raoul Ubac est un artiste complet, connu notamment pour ses contacts avec les surréalistes, ses expériences photographiques, entre autres, mais aussi pour son travail sur les pierres et l’ardoise. Pourtant, il a aussi expérimenté d’autres media : vitraux, tapisseries, peintures, gravures et sculptures jalonnent son parcours artistique. Une constante, toutefois, revient : l’amour de la nature, des ombres et des lumières qui façonnent les corps et les paysages, et celui des grands poètes qui l’accompagnent. Nourri de ses observations, son art se rapproche de l’abstraction et se caractérise par des couleurs sourdes et des structures rythmiques, particulièrement visibles dans ses ardoises sculptées et dans ses « Stèles » des années 1970. À Reims, une monumentale mosaïque en plaquettes de marbre éclaté anime de ses ondulations colorées les murs du hall de l’amphithéâtre de la faculté des sciences.
Cette sculpture monolithique acéphale, proche de la Corè de Samos, au Louvre, est aussi exceptionnelle par sa taille que par l’effet qu’elle dégage : élégance, puissance et mystère. Idoménée, homme ou femme, déesse ou simple mortelle ? Le monde d’Ubac nous emmène naturellement sur les chemins de la poésie et de la métamorphose. L’image du roi légendaire de Crète, petit-fils de Minos, connu pour avoir sacrifié son fils, s’efface au profit d’une forme symbolique, monstre de douleur et fantôme fier de sa présence au monde. Ce corps glorieux et hybride interroge nos sens : frontalité de l’objet représenté, éblouissement des noirs, griffures lumineuses et minéralisation de la matière.
Face à cette sculpture, les frontières tombent entre la nature et l’homme, et le temps s’arrête. En elle, la vie prend racine et s’élève par la contemplation de « La Beauté aveugle » (Ubac, « Troisième convoi », n° 3, 1946). [M. - H. Montout-Richard, 2017]
Notice complèteFigure féminine longoligne stylisée.
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Licence ouverte CC BY
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