Acheté 400 francs par Émile Gavet en 1866, le pastel fut acquis au prix de 29 600 francs, lors de la vente Ernest May à Paris en 1890. La valeur de l’œuvre justifiait aux yeux d’Henry Vasnier sa présentation encadrée, telle une peinture, à proximité d’un Théodore Rousseau (1812-1867) dans sa galerie d’art privée. L’extrême sobriété du paysage, dont le troupeau de moutons forme le registre médian se confondant avec la ligne d’horizon, rappelle la passion de l’artiste pour les sites maritimes de sa région d’origine qu’il n’oublie pas à Barbizon en s’intéressant à l’immensité de la plaine dénudée de Chailly. Le thème du berger solitaire est un sujet courant pour l’artiste entre 1850 et 1860. Placé au centre de la composition, la figure, de forme pyramidale, s’impose par sa monumentalité sculpturale et synthétique.
Rappelant ce pastel, plusieurs dessins postérieurs, « Le Berger dans la plaine » (1872-1874, Washington D.C., Phillips collection) et « Berger appuyé sur un bâton » (Paris, collection particulière), mettent en évidence la rigueur classique du travail de l’artiste, constatée notamment dans le traitement simplifié de la limousine du berger, vêtement alors démodé. Il existe par ailleurs un dessin conservé au musée du Louvre qui se caractérise par une écriture libre : par des hachures noires et grasses, l’artiste met en valeur les masses.
Le public fut très ému en 1860 devant le même sujet évoqué un soir d’hiver : « Berger ramenant son troupeau, le soir » (1857-1860, Philadelphie, Pennsylvania Academy of the Fine Arts). Zacharie Astruc écrit à propos de cette peinture : « Ce calme, ce mystère des premières ombres, ce caractère sauvage et doux de la nature, ce cercle rouge, œil de sang sur le berger méditatif – toute cette grandeur et ce sentiment vous plonge dans une émotion profonde » (Astruc, 1860, p. 68). De même, Millet reçoit tous les éloges pour « La Grande Bergère » (1862-1864, Paris, musée du Louvre) dont la pose méditative fascine. [D. Liot, 2002]
Berger en arrêt entouré d’un troupeau de moutons.
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